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Presentation de la conference Mozart le rebelle

        Cette conférence, présentée sous forme de spectacle avec diaporama, extraits musicaux vivants et enregistrés, propose de rencontrer Wolfgang Amadeus Mozart dans sa vraie dimension, débarrassé des mythes romantiques qui en altèrent l’image, l’amoindrissent ou le ridiculisent, tout en révélant les secrets de la musique en générale et les siens en particulier.
   « ... À peine fut-il parti que naquit peu à peu la fameuse légende qui fit de ce bonhomme un mythe et un génie. Que d’images stupides parce que réductrices n’a-t-on véhiculées: Mozart l’enfant prodige, Mozart béni de Dieu, Mozart le frivole, Mozart le libertin, Mozart le franc-maçon, Mozart le miséreux… 
    Ce qui semble amusant dans ces caricatures est cette collection d’images populaires dont chacun s’accommode au gré de ses fantasmes, au gré de ses envies, au gré de ses besoins. S’il est vrai d’après Proust que « nous ne sommes que des êtres successifs », il n’est reste pas moins que demeurent des constantes qui dirigent un parcours tout au long d’une vie. Et il en existe une dont personne ne parle alors qu’elle est présente dès les premiers instants, bien peu accommodante pour le mythe idéal et manipulateur du génie enfantin, soit, mais pourtant essentielle pour cerner avec force un être à l’apparence profondément classique, dont les compositions semblent peu différer de celles des mondains, mais à l’esprit tourné vers le siècle futur dans ses engagements, sa passion, son goût de liberté et les énormes risques qu’il a su assumer tant dans son écriture que dans sa propre vie, jusqu’à sa propre perte: celle du révolté, du révolutionnaire, en un mot du rebelle. »
1 - La rébellion
    « Je ne suis aujourd’hui plus assez malheureux pour être au service du souverain de Salzbourg. Aujourd’hui a été pour moi un jour de bonheur. Écoutez ! […] Quand je me présentai devant lui […], voici son premier mot : 
    - « Eh bien quand part ce jeune homme ?
    - Je voulais partir cette nuit, seulement la place était
      déjà prise. »
    Alors il explosa, et d’un seul coup, sans prendre haleine, me dit qu’il me conseillait de partir aujourd’hui même sinon il écrirait chez lui qu’on me supprimât mon traitement. Impossible de placer un mot, cela fusait comme un feu. J’écoutais tout cela et restais calme. Il me mentit en pleine figure, disant que j’avais un traitement de 500 florins. Il m’a traité de pouilleux, de gueux, de crétin… Oh ! je ne pourrais pas tout écrire. À la fin, mon sang bouillonnait tellement, je n’y tins plus et dit :
    - « Ainsi votre Altesse n’est pas satisfaite de moi ?
    - Quoi, il veut me menacer le crétin ! Voilà la porte, la
      voilà, je ne veux plus rien avoir à faire avec un pareil
      mauvais sujet. »
Et je répondis:
    - « Et bien moi non plus je ne veux plus rien avoir à        
      faire avec vous.
    -Alors filez ! »
Et moi me retirant :
    - « C’est bien, restons-en là ! Demain vous recevrez
      ma démission. » 
(in “Mozart”, J. et B. Massin - Éd. Fayart
2 - La magie de la musique
    L’initiation pour lui fut La Révélation. Du jour au lendemain sa musique changea, à tel point qu’on peut rien qu’à l’écoute savoir si c’est avant ou bien si c’est après, comme si l’homme entier fut métamorphosé.
    D’abord « les Dissonances », sa planche d’initié, suivi du concerto pour piano-forte en La dans lequel l’écriture atteint la dimension d’un chef d’œuvre majeur, tant le compositeur nage au-dessus des règles, se joue des traditions et invente à tout va: au départ trois thèmes dans le premier mouvement, puis neuf dans le dernier répartis en quinconce suivant son intuition, éclatant de lumière après la sicilienne étonnement intense dans laquelle il pétrit le son des instruments. Un art invraisemblable qui témoigne du choc profondément vécu lors de ses trois voyages sous la « voûte étoilée ».;
    Qu’y comprit le public. Rien, évidemment. Et alors qu’il partait dans un monde nouveau où chaque découverte lui permettait enfin  de trouver la lumière, l’authentique et le vrai, alors que désormais il inventait sans cesse en fuyant les clichés dont tous les italiens abusaient sans vergogne, il perdait l’adhésion des capricieux viennois qui l’avaient encensé lors de son arrivée et qui s’étaient lassés d’un langage savant qu’ils ne décodaient plus. Et plus Mozart allait de trouvaille en trouvaille, plus il prenait des risques dans ses compositions, plus montaient les cabales, les haines, les perfidies et plus ses ennemis s’en donnaient à cœur joie pour le discréditer auprès de la noblesse, du public et du roi.
3 - Le chef d’œuvre absolu
    À peine Mozart eut-il en main le livret de « Lulu ou La Flûte Enchantée » tiré de Wieland, l’Arioste allemand, que Schikaneder apprit que son  concurrent Marinelli de la Josephstadt, allait donner un opéra tiré du même conte, « Gaspard le Bassoniste ou La Cithare Magique », ce qui ruinait son projet. En homme avisé et jamais à court de ressource, Schikaneder sauta sur l’occasion  pour remanier  de  fond  en  comble et  de  façon inattendue le  sujet — d’où l’incohérence tant décriée entre le premier et le second acte — en y introduisant un symbolisme emprunté à l’Egypte Ancienne, proche des pratiques de la Maçonnerie. Pas assez lettré pour s’en sortir seul, il s’adjoignit les services de son nègre et acteur Giesecke, maçon lui-même, et d’Ignaz von Born, alors sur son lit de mort. À partir du « Sethos » de l’abbé Terrasson, publié en 1767 dont ils reprirent des textes entiers, — chœur et choral
des prêtres —, du « Thamos » de Gebler, et prenant exemple sur l’ « Oberon » de Giesecke, ils élaborèrent un livret qui redonnait à la franc-maçonnerie sa grandeur et sa noblesse, véritable apologie idéalement opportune compte tenu du contexte, traitée en féerie suivant  la mode populaire du moment et dont Mozart s’enthousiasma, totalement acquis à la cause, y travaillant lui-même pour en élever le niveau intellectuel, d’autant stimulé qu’il savait disposer d’un orchestre de bon niveau et d’excellents chanteurs.
	Ainsi naquit, le 30 septembre 1791, sous la direction de Mozart lui-même, assis au clavecin selon l’habitude du temps, « La Flûte Enchantée », chef d’œuvre absolu « dont la musique nous donne l’impression de pénétrer dans l’eau pure. »  (Karl Boehm)